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Vol de nuit, 1955


 

— Papi ! Comment ça vole un avion ?

— Il faut du vent, de la vitesse et surtout des ailes, comme les oiseaux. Un avion peut planer sans ses quatre moteurs à hélices. Juste grâce au vent, il peut planer comme un aigle dans les airs.

— Papi ! Avec un avion, on peut voyager loin ?

— Tu peux aller très loin, traverser l’Atlantique jusqu’en Amérique… Mais être un aviateur n’est pas donné à tout le monde. Il faut être passionné, aimer les mathématiques, être intelligent et toujours être le premier de sa classe.

— C’est pas facile de devenir pilote alors…

— Connais-tu les histoires d’Antoine de Saint-Exupéry, comme Le Petit Prince ?

— Non ? demande le petit-fils. Est-ce que c’est un conte de fées ?

— C’est une histoire merveilleuse qui mérite d’être racontée le soir pour t’endormir. Mais ce n’est pas celle que je vais te conter aujourd’hui. Je préfère te parler des avions, ces machines construites pour survoler la planète.

— Raconte-moi, Papi ! 

— Saint-Exupéry était un aviateur et il aimait raconter des histoires d’avions. Moi, j’aime beaucoup Vol de nuit. C’est l’histoire d’un chef d’une compagnie aéropostale, c’est-à-dire une entreprise qui s’occupe d’acheminer le courrier. Ce chef, donc, s’appelait Rivière…

— … Comme les rivières ?

— Oui ! Et Rivière était un homme très intelligent, et qui prenait son travail à cœur. Il savait que le courrier était une affaire importante. Les lettres permettent aux familles de s’écrire de partout dans le monde. Elles permettent de dire qu’on se manque, qu’on s’aime, et qu’on pense aux siens. Et les lettres, elles préviennent des événements importants, continue le grand-père.

— Oui, moi j’aime bien les lettres, mais personne ne m’en a jamais écrit. En même temps, je ne sais pas lire, alors je n’ai pas besoin de recevoir des lettres !

— Un jour, tu sauras lire et écrire, et tu pourras m’envoyer toutes les lettres que tu veux ! Je les lirai, où que je sois… Bref, Rivière voulait qu’elles arrivent vite, ces lettres si importantes ! Ainsi, il proposa d’acheminer le courrier par avion. Il pensait que ce serait bien mieux que le train, parce que les avions peuvent facilement traverser les mers et les océans, et qu’en montant tout en haut dans le ciel, ils traversent des distances bien plus grandes que sur la terre ferme, comme les oiseaux !

— Est-ce que ça veut dire que les oiseaux vont plus vite que les léopards ? Maman m’a dit que les léopards allaient très vite !

— Oui, certains oiseaux traversent le monde chaque année, comme les oies par exemple…

­ — Ou les cigognes qui apportent les bébés ?

— Oui… Les cigognes pour les bébés… s’embarrasse le grand-père.

— Et le traineau du père Noël ? Il va vite parce qu’il vole aussi, non ? Alors les rennes du père Noël sont plus rapides que les léopards ? Mais qui est plus rapide entre les oies, les cigognes et les rennes ?

— Je ne sais pas… En tout cas, les avions sont plus rapides que les oies, les cigognes... Tu me laisses terminer mon histoire ? Alors, Rivière était un chef de compagnie intransigeant avec ses pilotes. Il a réalisé que c’était mieux de voler en pleine nuit, pour pouvoir gagner du temps en travaillant aussi la journée. Et les pilotes avaient peur, et ils prenaient l’avion à leurs risques et périls. C’était très dangereux. Tu imagines être seul dans un avion en pleine nuit, à haute altitude, pour acheminer le courrier aux familles ?

— Est-ce que des avions se sont écrasés ?

— Une nuit, un pilote a trouvé la mort, et les lettres ne sont pas arrivées à destination. Rivière n’a pas voulu changer ses méthodes, il a toujours dit que les pilotes devaient pouvoir se sacrifier pour leur mission.

— Comme les chevaliers ?

— Oui, comme tous les héros. Voler de nuit pour apporter le courrier rapidement, c’était la mission des pilotes de cette compagnie aéropostale.

— Papi ! Moi aussi je veux devenir pilote, je veux conduire un avion quand je serai grand… Et si je dois voler de nuit, je le ferai !

 

Alan Alfredo Geday

 

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