James Dean a toujours été un garçon intelligent et sensible. « Tu as une sensibilité à fleur de peau », répétait le révérend Deweerd. Le révérend a accompagné l’âme torturée de James à Fairmount, il a voulu lui donner du calme, de l’apaisement, mais en vain. James n’avait que quinze ans, et il était déjà en quête de sensations fortes, il ne savait pas comment combler ce vide immense qui grandissait en lui. Une fureur sans objet. James Dean aimait les voitures et conduire vite, il aimait la tauromachie et les effusions de sang, et il aimait l’amour, plus que tout, et la passion. Il était déjà d’une beauté à couper le souffle, une beauté de rebelle, de poète maudit, d’enfant sauvage. Le révérend le regardait comme un ange tendre et un démon furieux. James Dean a su charmer tant de spectateurs par ce contraste dans son regard. James Dean a envoûté une Amérique populaire en quête d’un nouveau genre. Les adolescentes étaient folles amoureuses de ce rebelle sans cause. Un jeune homme dérouté, un éphèbe à la veste en cuir et la cigarette au bec, c’était l’un des leurs, une vedette si proche et si lointaine aussi.
James Dean a charmé la fabuleuse actrice italienne Pier Angeli. La côte californienne avait des allures de lune de miel. Son climat propice, ses chalets loin des regards. James Dean était un étudiant amoureux qui faisait l’idiot sur la plage, qui roucoulait au bord du rivage. Son cœur d’enfant le poussait à foncer sur les autoroutes, toujours plus loin et toujours plus vite, avec Pier Angeli à ses côtés, dont le foulard vibrait dans le vent, dont les lunettes de soleil miroitaient dans le soleil. Elle était belle et fougueuse. Toujours plus vite, plus loin, sur l’autoroute 466 ! « Tu es l’amour de ma vie », lui avait confié Pier Angeli. Pourquoi ? Parce qu’ils se racontaient leur vie, parce qu’ils philosophaient sur l’absence de sens, sur la vanité de tout, sur la nécessité de se brûler les ailes pour oublier, et parce qu’ils étaient heureux, incroyablement heureux ensemble.
Les deux amoureux se tenaient la main comme deux innocents, ils se regardaient, ils s’échangeaient des baisers à l’abri des paparazzi comme deux enfants. Mais les côtes de la Californie sont loin des traditions italiennes ! James Dean, le sauvage ! James Dean, le blond qui fume ! Qui arrive toujours en retard à ses rendez-vous, qui méprise toutes les convenances ! James Dean, l’irresponsable et l’irrévérencieux ! D’après la mère de Pier Angeli, il n’était pas un bon catholique. Il ne croyait pas en l’Église, il ne croyait pas en la Madone, mais juste en sa mère. Seule sa mère morte d’un cancer l’avait compris, avant sa chère Pier Angeli, son ange tombé du ciel. James était orphelin. Sa mère quitta le monde quand il avait neuf ans, et son père l’avait abandonné. Et James Dean fonçait encore plus vite ! Il atteignit des records aussi bien dans ses rôles à la Warner Bros que sur la route. Deux cent quarante kilomètres-heure ! Qu’il fût au volant d’une Triumph Tiger T110 ou d’une Porsche 356, James Dean n’était jamais satisfait. Était-ce des regrets ? Était-ce de l’amertume ? Le destin le guettait sur les routes de la Californie. Un matin, à l’intersection de la route 46 et de la route 41, sa Porsche fut retrouvée en débris. Les voisins furent alertés par un bruit assourdissant. Son ami, assis sur le siège éjectable à côté de lui, fut éjecté à quelques mètres de la Porsche. Mais James Dean perdit la vie ce jour-là dans sa voiture. Le soleil se leva sur la côte californienne quand Pier Angeli décrocha son téléphone et fondit en larmes.
Alan Alfredo Geday
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