top of page

Pays bigouden, 1956


 

Il était une fois un roi, un roi puissant qui régnait sur la France sans partage, un roi que l’on appelait le Roi Soleil. Un roi rayonnant et orgueilleux. Louis XIV était connu pour dilapider les caisses du royaume en fêtes somptueuses à Versailles et en réjouissances diverses. Grandeur et démesure aux yeux de tous ! Les fêtes faisaient le prestige de la cour. Elles éblouissaient bourgeois et étrangers, et rassemblaient la noblesse parfois infidèle au château. À Versailles, la semaine était partagée entre les concerts, la comédie française, la tragédie, le jeu et les ballets. Le ministre des finances, Colbert, que l’on surnommait « la couleuvre », n’était pas vu d’un bon œil par le peuple appauvri par son roi.

 

Cela ne faisait qu’un siècle que la Bretagne appartenait à la France, et elle jouissait de quelques libertés et exemptions, ne payant pas la gabelle, cette fameuse taxe du sel. Lorsque le royaume de France fit la guerre à la Hollande, les caisses s’asséchèrent, et Colbert conseilla au roi d’instaurer une taxe sur le papier timbré, s’appliquant ainsi à tous les actes notariés. Les Bretons s’offusquèrent de cette nouvelle taxe. Ce roi ne manquait pas de toupet ! Et les révoltes sévirent ainsi dans le pays breton. La colère ne s’exprima pas seulement contre le roi, mais aussi contre les seigneurs qui le représentaient. Les insurgés voulaient forcer les seigneurs à renoncer à leurs droits. Les Bretons sortirent de chez eux, portant un bonnet rouge ou un bonnet bleu, pour assiéger les châteaux et hurler leur rage. C’est la raison pour laquelle on l’appelle maintenant « la révolte des bonnets rouges ». La répression ne se fit pas attendre, et le roi fit pendre et envoyer aux galères les révoltés. Les Bretonnes perdirent leurs époux, leurs fils et leurs frères, et cette triste histoire resta gravée dans leur cœur. C’est ainsi qu’une coutume est née : la coiffe bigoudène, symbolisant tous les clochers abattus pendant la répression. Et avec les années, la coiffe devint de plus en plus haute et de plus en plus raffinée.

 

Aujourd’hui, en 1956, les femmes du pays bigouden portent leur coiffe avec fierté. La dentelle est fine, bien amidonnée et la coiffe mesure bien quarante centimètres ! C’est signe de la grandeur bretonne, ce territoire jamais soumis, toujours indépendant et plein d’orgueil. Et la langue bretonne fleurit dans leur bouche, il s’agit de ne pas l’oublier, cette richesse du pays.

 

Trugarez !

 

Alan Alfredo Geday

bottom of page