Marlon Brando est l’un des acteurs de cinéma les plus célèbres de tous les temps. Il est notamment connu pour sa grande présence à l’écran et ses marmonnements discrets. Mais derrière ses joues chargées de coton se cache un garçon qui a grandi avec une mère alcoolique. Sa mère, connue sous le nom de Dodie, n’était pas conventionnelle pour son époque. Elle fumait, portait des pantalons et conduisait des voitures. Elle était actrice et administratrice de théâtre. Elle était souvent ramenée à la maison des bars de Chicago par son mari. Souvent saoule, elle dérogeait aux règles de la féminité discrète et soumise de l’époque. Une femme de caractère, une femme moderne. Le père était frustré et en colère. Et le comportement de Marlon Brando ne lui plaisait pas davantage. Il lui disait qu’il ne pouvait rien faire de bien et qu’il n’arriverait jamais à rien. Heureux présage. Puis l’inéluctable se produisit et ses parents se séparèrent lorsqu’il avait onze ans. Dodie emmena Marlon Brando et ses deux sœurs en Californie où il trouva son premier petit boulot comme ouvreur dans le seul cinéma de la ville.
Marlon, dont le surnom d'enfance était « Bud », avait des dons d’imitation. Il avait développé une capacité à absorber les manières des enfants avec lesquels il jouait. Il pouvait les observer pendant des heures, pour capter leur essence, leur expression profonde, ce qui les rendait unique, simplement par le mouvement de leurs corps et de leur visage. Le premier rôle de Brando consistait à imiter les vaches et les chevaux de la ferme familiale afin de distraire sa mère de l'alcool. Sa sœur Jocelyn fut la première de la fratrie à poursuivre une carrière d'actrice, en allant étudier à l'American Academy of Dramatic Arts de New York. Elle apparut à Broadway, puis au cinéma et à la télévision. Frances, la sœur de Brando, quitta l'Université en Californie pour étudier l'art à New York. Pendant ce temps-là, Bud éprouvait ses limites et sa liberté. Ainsi, il redoubla et fut renvoyé du lycée de Libertyville pour avoir conduit sa moto dans les couloirs. Il fallait dire que sa moto, c’était sa vie. Sa vitesse, sa virilité, son indépendance.
Il fut envoyé à l'Académie militaire Shattuck dans le Minnesota, où son père avait étudié avant lui. Brando excellait en art dramatique et obtint de bons résultats à l'école. Le cancre en avait dans la tête, finalement, malgré ses bêtises permanentes. Lors de sa dernière année, il fut mis en probation pour insubordination envers un colonel de l'armée en visite pendant les manœuvres. Il fut confiné dans sa chambre, mais il était hors de question pour Marlon de rester enfermé, ne serait-ce qu’une journée. Alors, il fit le mur et alla en ville. Ah ! Cet air frais, ces lumières, ces voitures, ces cinémas, ces femmes ! Il était libre. Mais son insouciance ne dura qu’un instant, et à son retour, la faculté vota son expulsion. Marlon était quelque peu irresponsable, mais il aimait ça.
Marlon Brando travailla comme terrassier, un emploi d'été arrangé par son père. Il tenta de s'enrôler dans l'armée, mais son examen d'entrée révéla qu'une blessure de football qu'il avait subie à Shattuck lui avait laissé un genou fragile. Il fut classé physiquement inapte au service militaire et ne fut pas incorporé. Finalement, il décida de rejoindre ses sœurs à New York, et étudia à l'American Theatre Wing Professional School, qui faisait partie du Dramatic Workshop of the New School, avec l'influent réalisateur allemand Erwin Piscator. La sœur Jocelyn de Barndo se souvient : « Il jouait dans une pièce de théâtre à l'école et l'appréciait .... Il a donc décidé d'aller à New York et d'étudier le théâtre parce que c'était la seule chose qu'il avait appréciée. C'était quand il avait dix-huit ans ». Marlon Brando tomba dans le métier d’acteur à New York parce qu’il était accepté là-bas. Il n’était pas critiqué. C'était la première fois de sa vie qu'il entendait de bonnes choses sur lui-même. Il a passé ses premiers mois à New York à dormir sur un canapé, à rêver en regardant par la fenêtre. Devant ces buildings infinis, il songeait aux grands rôles qui l’attendaient…
Alan Alfredo Geday
Comments