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Les femmes savent tirer, 1945


Getty Images

 

La guerre est une affaire d’hommes depuis toujours… Pendant la Seconde guerre mondiale, seule une minorité de femmes prennent part à la lutte armée. Certaines sont parachutées sur les côtes normandes afin de former des équipes de saboteurs comme Jeanne Bohec. D’autres organisent plusieurs opérations dont couper des câbles téléphoniques surtout pendant la bataille d’Angleterre, repérer l’ennemi et transporter des armes, organiser des manifestations de ménagères contre le rationnement. Ainsi, Blanche Paugam est immédiatement arrêtée pour avoir saboté des lignes téléphoniques. C’est la première française condamnée à mort pour acte de résistance. Les Allemands n’osent pas l’exécuter, et elle déménage de camp en camp avant de mourir d’épuisement. À l’époque, les femmes sont des citoyennes de seconde zone privées du droit de vote, qui ne peuvent pas travailler sans l’accord de leur époux ni posséder un compte en banque. Certains gouvernements les réduisent au rôle de mère au foyer et d’épouse. Ces attaques à leur liberté les motivent au cours du conflit des années 40 à s’engager.

 

La guerre est terminée, la France libérée. Les femmes sont venues nombreuses à la fête foraine. On veut célébrer ensemble, on veut se sentir libre. Les stands sont magnifiquement décorés. On y trouve des lutins et des peluches colorées. La musique résonne dans le vent, et les effluves de pomme d’amour se mêlent aux sucettes et aux crêpes au sucre. Les enfants en profitent, on enjambe un cheval, on attend son tour avant de monter sur le carrousel. Le temps est compté, la fête foraine ne restera en Normandie qu’une poignée de jours. Les bambins font la queue pour une Barba papa. Elles sont immenses, nuageuses, roses comme le ciel de cette fin d’après-midi. Plus loin, un jongleur démontre son talent en lançant dans l’air plus de huit petites balles. Il les rattrape délicatement avant de les relancer. Il est vraiment doué celui-là ! On le regarde, on applaudit et on l’acclame : « Bravo ! » Ici, un géant avance sur ses échasses. Il souffle dans son flacon de savon, et les immenses bulles s’échappent dans l’air à la grande joie des visiteurs du Calvados. Et il y a le contorsionniste.  Ses acrobaties sont d’un autre genre. Un grand écart puis une pirouette et un saut périlleux ! Sublime ! Les visiteurs sont comblés et les spectacles sont nombreux. Plus loin, on entend des gens hurler : « Mais il est fou ! » Quel courage ! Le funambule avance sur une corde tendue à plus de quinze mètres. Il est très fin, et se déhanche avec délicatesse.

 

Et il y a ce stand où deux femmes montrent leur adresse ! La guerre est terminée, et l’envie de résister à l’ennemi est encore ancrée dans les esprits. Les bouteilles de verre vide font office de bécassine. Les deux résistantes rechargent tranquillement leur fusil de chasse et vise les bouteilles. En voilà une qui explose ! Puis une autre qui se brise ! Les hommes qui passent à côté du stand sont impressionnés. Les femmes savent tirer et elles ont fait preuve d’un grand courage pour libérer les côtes normandes de l’ennemi nazi. On dépose l’arme de chasse, et on recharge. On vise, on tire, on libère la France !

 

Alan Alfredo Geday

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