Le Jourdain, 2000
- alanageday
- 3 juin
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Le Jourdain est un fleuve qui s’écoule sur trois cent soixante kilomètres du mont Hermon au Liban jusqu’à la mer Morte. Sa vallée est la plus basse du monde puisqu’il se jette dans la mer Morte à l'altitude de 421 mètres sous le niveau des océans. D’ailleurs, les arabes l’appellent Nahr al-Urdun : « descendre ». La Jordanie et les hauteurs du Golan bordent le fleuve à l'est, tandis que la Cisjordanie et Israël se trouvent à l'ouest. En hébreu, on nomme le fleuve Nehar haYarden : « Rivière de la Peine ». En effet, C'était un lieu important pour les prophètes de l'Ancien Testament, le Tanakh. C'est l'une des limites de la Terre promise aux Hébreux menés par Moïse. Selon les évangiles synoptiques, Jésus-Christ a été baptisé par Jean le Baptiste dans les eaux du Jourdain. Le fleuve est ainsi devenu un lieu de pèlerinage pour les chrétiens.
Le Jourdain borde deux territoires fortement contestés : le Golan et la Cisjordanie, occupés par Israël depuis 1967. Et la problématique de l’eau dans le bassin du Jourdain s’inscrit pleinement dans le conflit régional. L’enjeu de l’eau n’est pas qu’un élément secondaire, face à d’autres questions plus importantes. Il est une des clés des rapports entre Israël et ses voisins arabes. Le contrôle de l’eau est enfin un enjeu sensible aujourd’hui avec la croissance de la demande, obligeant les États à rechercher de nouvelles sources d’approvisionnement, comme les nappes phréatiques de Cisjordanie. Le débit naturel du Jourdain n’est que de 500 millions de m³ au sortir du lac de Tibériade, et 1400 millions de m³ à son embouchure dans la mer Morte. Mais dans les faits, c’est-à-dire avec l’exploitation du fleuve, le débit n’est que de 70 millions de m³ à Tibériade et de 160 millions à la Mer Morte. Mais qui prend l’eau ?
La Jordanie dispose de 800 millions de m³ par an, dont plus de la moitié proviennent des nappes fossiles ou renouvelables. Elle a réalisé des aménagements pour exploiter ses ressources : pompes pour prélever dans les nappes phréatiques, barrages sur la Zarqa et d’autres petits affluents du Jourdain. La principale réalisation est le canal du Ghor oriental, parallèle au Jourdain, commencé à partir du Yarmouk en 1959, et étendu progressivement pour atteindre la mer Morte en 1987. Il permet d’alimenter la ville d’Aman et d’irriguer des terres. En Israël, les prélèvements annuels s’élèvent à 1900-2000 millions de m³, ce qui dépasse de 8 à 14% les ressources brutes disponibles. Pour augmenter leurs prélèvements sur le Jourdain, les Israéliens ont construit l’Aqueduc National détournant les eaux du lac de Tibériade et traversant tout le territoire israélien pour alimenter le désert du Néguev. Israël exploite aussi beaucoup les nappes phréatiques de Cisjordanie, ce qui provoque la colère des autorités arabes. Mais qui fait la guerre et surtout qui la veut ?
La Syrie se trouve dans une problématique différente : à l’Est, elle appartient au bassin de l’Euphrate, à l’Ouest, à celui du Jourdain. Ses prélèvements sont plus importants du côté de l’Euphrate. Cependant, l’exploitation des affluents du Jourdain n’est pas négligeable. Le Yarmouk est l’un des principaux affluents du Jourdain et de nombreux barrages ont été réalisés sur son bassin versant. Par ailleurs, une source de tension très forte avec Israël est la question du Golan, territoire syrien annexé par l’État hébreu à la suite de la Guerre des Six-Jours, en 1967. Car cette région est un véritable « château d’eau », de nombreux petits cours d’eau se jetant dans le lac de Tibériade dont 15 à 20% des eaux d’Israël viennent du Golan. La Syrie réclame ainsi toute l’eau du Golan, en vertu de la doctrine de la souveraineté absolue sur un territoire, tandis qu’Israël met en avant le droit d’usage et l’impossibilité économique de renoncer à cette eau.
Nous sommes en 2000 ! Les populations ont besoin d’eau. Et des guerres se déclarent encore aujourd’hui !
Alan Alfredo Geday