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Le chercheur d’or, 1950


Getty Images

 

« Ne voyagez jamais seul » est un principe du Grand Nord. Noah, le chercheur d’or, n’est pas seul en ce jour de printemps, il est accompagné de son ami à la fourrure d’argent, son chien-loup, Lucky. Noah se lève tous les matins dans l’Alberta au Canada, convaincu qu’il trouvera de l’or dans les rivières. L’aube est apparue, froide et grise, lorsque Noah et Lucky ont quitté la piste principale pour gravir la rive abrupte, à travers une épaisse forêt d’épicéas émeraude. Le succès appartient à ceux qui se lèvent tôt. C’est une belle journée, et cependant un voile imperceptible semble s’étendre sur la rivière cernée de résineux sombres, et le soleil se noie dans un frimas piquant. Noah charge son canoë, dépose sa bâtée et sa pelle. Lucky flâne gaiment à ses côtés. « Allez ! Hop ! » dit-il à Lucky qui bondit dans le canoë. L’animal s’assoit à l’avant de l’embarcation. Ses grands yeux jaunes se perdent dans l’horizon dentelé des épicéas, des roches et des montagnes. Le vent agite sa fourrure épaisse. Son souffle chaud forme un nuage de vapeur. Le murmure sauvage de la rivière s’engouffre dans ses oreilles aux aguets. Lucky est toujours à l’affût dans ce monde où règnent le silence et la solitude. Dans ce monde de l’immensité indomptée, figé dans une tristesse froide.

 

Les deux complices savent que les rivières sont un trésor. Les premiers venus seront les premiers servis. L’automne dernier, Lucky a aidé Noah à dérober plus de trente onces d’or aux rivières de l'Alberta. C’est une sacrée somme d’argent qui a permis de chauffer la cabane, de négocier quelques bêtes aux trappeurs, et de retaper la coque du canoë. « Oyez ! Oyez ! » hurle Noah en enfonçant les rames dans l’eau. Des oies bernaches traversent le ciel, formant un V parfait, comme pour annoncer la victoire. Lucky est sur ses gardes. Il surveille son maître. Aujourd’hui est un beau jour pour trouver de l’or sous toutes ses formes : en paillettes, en pépites ou en particules. Lucky aboie. Il a senti quelque chose. Noah arrête le canoë et descend dans la rivière. Il secoue la bâtée dans l’eau pour délier les cailloux et la terre. Il recommence son geste inlassablement. Il n’aperçoit aucun éclat. Aucune trace d’or. Lucky insiste et saute dans la rivière en éclaboussant son maître. « Là, là... Ne sois pas impatient... Nous allons trouver ! »

 

Dans le Grand Nord, la vie est un défi, une aventure permanente. Lucky aime le printemps et la liberté de courir, de bondir et d’aboyer contre les bêtes qui se tapissent entre les herbes, les lapins, les renards, les oiseaux. Il aime s’ébrouer dans la rivière, parmi les poissons luisants et leurs soubresauts étonnés. Il aime traverser les forêts, sans traineau, sans attelage, seul avec son maître, et descendre les rivières liquides, quand la glace a fondu sous le soleil ami.

 

Alan Alfredo Geday

 

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