Le peintre anglais Charles Cundall vient de terminer sa toile baptisé Le retrait de Dunkerque. Selon ces deux soldats écossais, le tableau est un chef d’œuvre en ces temps de guerre. L’évacuation du corps expéditionnaire britannique à travers la Manche depuis Dunkerque, sur la côte française, a été salué en Grande-Bretagne comme un exploit extraordinaire. Pour Winston Churchill, les « petits navires de Dunkerque » sont entrés dans la mythologie des actes de bravoure. Les avancées allemandes en Belgique et dans le Nord de la France ont forcé la force impériale britannique à se diriger vers l'ouest, vers la Manche, et l'évacuation a commencé le 27 mai pour se terminer le 4 juin. Il s'agissait clairement d'une course contre la montre où un grand nombre de troupes étaient menacées par la vitesse et la puissance sans précédent de l'avancée du Troisième Reich. Une série de petits navires civils de la côte britannique sont venus en aide aux navires de transport de troupes débordés, aidant à évacuer autant de soldats que possible. 200 000 soldats britanniques et 140 000 soldats français ont été évacués, l'opération se poursuivant jusqu'au dernier moment. Une fois que les combats ont atteint la ville de Dunkerque, les réservoirs de pétrole en feu ont envoyé un nuage de fumée noire caractéristique sur le littoral. Le tableau de Charles Cundall rend hommage aux petits navires qui évacuent les soldats sous les nuages de guerre.
— Regarde-moi ce magnifique tableau ! s’émerveille le premier soldat écossais.
— C’est assez incroyable ! La façon dont est représentée la force impériale britannique…
— Tout a été dessiné à la perfection. À gauche s'étendent les dunes couvertes de soldats en longues lignes kaki, explique le soldat. De petites embarcations chargées de troupes quittent le bord de mer pour se diriger vers de plus grands navires à droite de l'œuvre, continue-t-il en pointant du doigt la couleur bleue. Au centre, des troupes font la queue le long d'une jetée de fortune en direction des navires en attente. À l'arrière-plan gauche, d'énormes nuages de fumée noire provenant de la ville remplissent le ciel. Des avions volent au milieu des explosions des tirs anti-aériens, et ici un avion plonge vers l'horizon.
— Je qualifierai cette œuvre de chef d’œuvre ! C’est un chef d’œuvre, s’enthousiasme le deuxième soldat écossais.
— Il faudra l’exposer dans un musée quand cette foutue guerre se terminera.
— Il va falloir un jour inverser les rôles et débarquer sur une côte quelque part…
— Le jour viendra où l’on débarquera avec les forces américaines.
— Mais les Américains ne sont pas en guerre, enfin !
— Ça ne va pas tarder ! Winston Churchill a fait le voyage aux États-Unis pour relater cet exploit des petits navires marchands anglais. Les Américains viendront au secours des Anglais.
— Tu penses ? demande avec inquiétude le deuxième soldat écossais.
Au début de la Seconde Guerre mondiale, Charles Cundall a travaillé sur des contrats à court terme pour le War Artists' Advisory Committee avant de recevoir une commission salariée à plein temps en tant qu'artiste de l'Amirauté pour travailler sur des sujets de la marine marchande. Charles Cundall passe du temps sur la Tamise, dans le Medway et le West Country à travailler sur cette commande avant d'être affecté au ministère de l'Air en 1941. Il termine ses toiles de l'Amirauté tout en commençant à travailler sur des sujets du Bomber Command et du Coastal Command. Il passe la première moitié de 1942 en Irlande du Nord à peindre les troupes américaines qui y arrivent et travaille en Écosse en septembre et octobre de la même année. Charles Cundall peint des sujets de la RAF dans toute la Grande-Bretagne, travaille sur une peinture majeure de la cérémonie de commémoration de la Bataille d'Angleterre pendant plusieurs mois en 1943.
Alan Alfredo Geday
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