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L’histoire d’un homard, 1940


Getty Images

 

Que faire de mieux un dimanche que d’aller passer du bon temps à la mer ? Il fait beau, légèrement venteux, et le temps est agréable. C’est ce que Michael a proposé à sa fille Jane ce matin. « Emmenons les masques, on fera de la plongée en apnée ! » Le père et sa fille Jane ont longé toute l’autoroute du Pacifique pour trouver la crique idéale pour s’installer au bord de la plage, mettre les planches de surf à l’eau et profiter de la mer bleue. Michael souhaite passer toute la journée dans l’eau, il a besoin de se rafraîchir les idées. Son travail de recherche au centre océanographique de San Diego l’épuise autant qu’il le passionne.  Heureusement que l’on est dimanche ! Aujourd’hui, pas de travail et encore moins de recherches sur la faune qui peuple les océans. Cela fait quinze ans qu’il étudie les espèces animales qui respirent sous l’eau. Il en connaît la plupart, pas toutes, mais après tant d'années de recherches et d’études, il est capable de tenir un discours impressionnant. Jane commence à développer, elle aussi, une passion pour les étranges créatures qui vivent sous l’eau. Elle poursuit un cursus général à l’université en attendant de se spécialiser en océanographie, comme son père. Mais aujourd’hui, c’est dimanche, c’est le moment de se vider l’esprit. « Il faut faire le vide dans sa tête », explique Michael à sa fille. C’est essentiel pour reprendre des forces, c’est crucial pour prendre plaisir à plonger en apnée. Les voilà qui mettent les planches à l’eau. Ils s’avancent et rencontrent deux hommes qui profitent comme eux du beau temps. Michael fait glisser son masque et plonge en apnée. Quelques instants plus tard, Michael remonte avec un crustacé.

— Super ! Qu’est-ce que c’est ? Une langouste ou un homard ? s’enthousiasme Jane.

— C’est une langouste, affirme l’homme qui nage à côté d’eux.

— Non, je dirais que c’est un homard, il a des pinces. La langouste n’en a pas, le reprend Michael.

— Cela fait quelques années que je plonge ici, dit l’homme. Et je n’ai jamais trouvé un aussi grand crustacé dans les environs. Pourtant, je cherche entre les rochers, mais j’ai toujours pêché de petites choses comme des moules ou des étoiles de mer.

           — Je suppose que c’est mon jour ! s’enorgueillit Michael.

— Quelle est son histoire ? demande Jane.

— Il vient d’être pêché et il est prêt à être dégusté, s’amuse Michael.

— Tu es amusant comme toujours, papa ! le cajole-t-elle. Alors, raconte-moi l’histoire du homard maintenant !

— Alors le homard ! C’est une longue histoire pour ma fille Jane qui aime tant les histoires. Il y a un peu plus de cent ans de ça, on appelait le homard « le cafard de la mer ». C’était le repas des pauvres, c’était la manne des plus démunis. Le homard était alors anonyme. Personne ne le connaissait, seuls les pauvres en mangeaient…Personne n’en voulait et aujourd’hui, tout le monde en raffole !

          — Bien étonnant cette histoire, papa ! s’étonne Jane qui a déjà faim.

— Non, c’est vrai, on le donnait aux prisonniers, aux domestiques, aux veuves. Aux prisonniers, au moins trois à quatre fois par semaine ! Mais tout ça, c’était au dix-huitième siècle. Ça a bien changé depuis !

           — Et après ? demande Jane.

        — En 1836, la compagnie américaine Burnham et Morrill décide de le commercialiser, de le mettre en boîtes de conserve, il y en avait tellement à l’époque qu’ils se sont dit que ça pourrait alimenter la classe moyenne. Les actionnaires de Burnham et Morrill voulaient l’exporter en dehors du Maine et du Massachusetts, les deux Ètats qui étaient surpeuplés de homards…

           — Et après papa ? demande Jane.

          — Et après, le homard est devenu plus rare, plus, cher, plus apprécié... Mais rentrons le préparer, je te raconterai la suite à la maison...

 

Alan Alfredo Geday

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