« On ne peut pas gouverner un pays qui offre deux cent quarante-six variétés de fromage », a dit Charles de Gaulle. Le fromage fait partie du quotidien des Français. Ils ne peuvent s’en passer et refusent de le consommer avec modération. Il y en a pour tous les goûts : de brebis, de vache, de chèvre, à croûte fleurie ou lavée, à pâte molle ou pressée, persillé, frais ou fondu. Le fromage s’est répandu en France au XIXe siècle quand Émile Duclaux, disciple de Louis Pasteur, adapte le procédé de pasteurisation au fromage. L’industrie fromagère prend alors son essor, pour le plaisir des Français qui l’adorent. Et avec le fromage, un verre de bon vin français est souvent le bienvenu. Certains diront que seul le vin rouge, fruité et léger ou épais et tanique, peut accompagner un morceau de fromage, pour donner à l’ensemble du corps et de la personnalité. D’autres affirmeront que le vin blanc, minéral ou sucré, selon les préférences, fait mieux ressortir les arômes subtils de certains fromages. Ces débats passionnés animent les tables des Français qui tous ont un avis sur la question, c’est une histoire presque patriotique !
— Comment on a pu avoir l’idée de manger du fromage moisi comme le roquefort ? demande l’apprenti à son maître.
— Tu dois connaître cette légende. La naissance du roquefort vient de la maladresse d’un berger un peu frivole. Ce berger était parti se promener avec sa jolie bergère. Il avait laissé dans une grotte du pain et du fromage de brebis. À son retour, tout était recouvert de moisissure ! Mais ça ne l’a pas empêché de mordre dans le fromage. C’était à son goût, et il l’a tellement aimé qu’il en a refait dans ses caves. Ainsi est né le roquefort ! Mais ce n’est qu’une légende, ajoute le maître en perçant la grosse tomme de Thônes.
— Quand est-ce que cette série arrive à maturité ?
— Il faut goûter ! Tiens, mange ce morceau, et décris-moi le goût !
L’apprenti saisit un copeau de tomme qu’il place sous sa langue. Il attend quelques instants sous le regard attentif de son maître.
— Alors ? demande son maître.
— C’est encore laiteux…
— Et la croûte ? Comment tu la trouves ?
— Un peu brune, non ? Elle n’est pas encore blanchie par la moisissure…
— Ce n’est pas bon signe, il faut la laisser plus de temps dans la cave afin qu’elle arrive à maturité, affirme le maître. Ici, en Savoie, nous avons le devoir de fournir le meilleur fromage ! Tu feras bientôt le plus beau métier du monde…
— Est-ce que vous pensez que c’est un art ?
— C’est de l’artisanat, c’est encore mieux ! Vois un peu tout le travail et le talent qu’il faut ! Et le temps… C’est un travail de patience ! Le procédé de fabrication du fromage est long, très long ! Il faut déjà des vaches laitières. Beaucoup de vaches ! Il faut les élever, les nourrir, en prendre soin… Et puis il faut les traire, évidemment ! Ensuite, il faut faire cailler le lait. Le caillé, c’est cette coagulation du lait sous l’action du ferment. Le caillé est ensuite tranché, rompu et fragmenté. Puis vient l’égouttage où le caillé est vidé de son lait. Puis les grains de caillé sont placés dans un moule où l’eau s’égoutte tranquillement. C’est le moulage. Puis vient l’étape de l’affinage. C’est une étape essentielle, et c’est là que le talent intervient ! À chaque variété correspond un affinage. Puis vient le salage et enfin la dégustation…
Alan Alfredo Geday
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