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Donnez-nous de la pulp fiction, 1994


 

Tout le monde connaît ce poster que le réalisateur Quentin Tarantino pointe du doigt. C’est son dernier long-métrage intitulé Pulp Fiction qui vient de sortir sur le grand écran. Pourquoi ce titre ? C’est une référence aux magazines Pulp, ces magazines que l’on achète dans les kiosques à journaux des États-Unis pour quelques centimes. « Pulp », c’est le papier de mauvaise qualité sur lequel on imprime des histoires illustrées d’enquêtes criminelles, de science-fiction, de récits fantastiques ou de romances. Des histoires à trois sous, des histoires populaires. Ce genre de magazines qui remplissent les poubelles de Central Park, les chambres des adolescents et les banquettes de bus. Ce genre de magazines que l’on feuillette en mangeant un hot-dog, sans se préoccuper des taches de gras. En donnant ce titre à son film, Quentin Tarantino signe un manifeste de mauvais goût. Le mauvais goût à l’origine d’un film d’auteur.

 

Quentin Tarantino, donnez-nous de la pulp fiction, s’il vous plaît ! Nous voulons nous divertir, nous voulons passer un moment agréable au cinéma ! Nous voulons voir danser Vincent et Mia dans un dinner kitsch. Nous voulons voir du sang gicler sans avoir peur. Nous voulons traverser l’Amérique dans des voitures volées, et sympathiser avec des tueurs à gages. Et même ceux qui n’ont pas vu le film diront : « J’ai déjà vu ça à la télé, ça me dit quelque chose ! » C’est bien Pulp Fiction. Un film qu’on avait tous déjà vu avant de l’avoir vu. Un film culte dès sa sortie. Culte, non pas seulement parce qu’il provoque par ses scènes de violence, mais parce qu’il parodie avec sérieux, parce qu’il suinte l’autodérision et la rébellion, parce qu’il est truffé de références populaires et érudites. Quentin Tarantino est un punk du 7e art. Un auteur dada, un auteur coup de poing et underground. Un auteur qui se moque des cinéphiles et des critiques, et qui leur dit : « Si vous aimez mes films, vous devrez admettre que vos goûts sont à revoir ! Vous devrez admettre que vous vous êtes trompé sur toute la ligne depuis le début ! Vous devrez admettre que l’art populaire est un art, qu’il existe une culture qui n’est pas une sous-culture que les gens aiment et reconnaissent ! »

 

Quentin Tarantino veut donner des lettres de noblesse à ce qui est décrié, jugé mauvais. C’est un mélange d’humour noir, de violence et de kitsch, sans oublier une inspiration puisée dans l’univers de la série B. Les squatteurs des salles obscures adorent Quentin Tarantino. La culture est très large, elle fait du fourre-tout organisé et rassemble les intellos, la masse populaire, les jeunes et les vieux. Quentin Tarantino veut forcer la critique à voir autrement. Ses personnages clés peuvent discuter de la dernière chanson de Madonna Like a virgin ou même des hamburgers, avec solennité. Préfères-tu la mayonnaise sur le pain du dessus ou du dessous ? Moi, c’est plutôt des oignons grillés pas caramélisés ! C’est cette sauce que les cinéphiles dégustent en regardant un film de Quentin Tarantino. Une sauce grasse et écœurante dont on ne se lasse pas, comme la recette secrète du Big Mac.

 

Quentin Tarantino, donnez-nous de la pulp fiction !

 

Alan Alfredo Geday

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