top of page

Creed, 1979


Getty Images

 

— Tu penses trop à cette femme ! Je le vois dans tes yeux que tu me caches quelque chose. Tu te faufiles dans les rues de Philadelphie en amoureux alors que l’important en ce moment, c’est l’entraînement ! Tu dois te concentrer, tu sais qu’Apollo Creed est le champion du monde de boxe de poids lourds. Et toi, tout ce que tu as à l’esprit, c’est cette femme…

— De quelle femme me parles-tu ? Tu ne vois pas que je m’entraîne et que je suis prêt à couper des flancs de bœuf ?

— Écoute-moi ! Ce n’est pas la façon de faire. Tu laisses cette femme de côté et tu t’entraînes ! Tu peux remporter plus de cent cinquante mille dollars dans ce combat. Apollo Creed est un grand champion, il frappe dur, il est agile, il a de l’expérience…

— Calme-toi Mickey ! Déjà, chaque chose en son temps ! De quelle femme me parles-tu ? Je ne fréquente pas de femme, je m’entraîne pour le grand combat. Mickey, tu es têtu…

— Moi, têtu ! J’ai accepté de t’entraîner, de te coacher ! Maintenant, il faut rattraper le temps perdu. Tu as trop longtemps gâché ton talent. Si tu m’écoutes bien, tu pourras faire trembler l’arène, faire vibrer le public et devenir une légende !

 

Le champion de boxe Apollo Creed a annoncé son intention de tenir un combat pour célébrer le bicentenaire des États-Unis d’Amérique. Malheureusement, son rival s’est blessé le poignet, et personne n’est disponible pour le défier. Enfin personne ! Un homme, que l’on appelle Rocky, veut tenter sa chance pour cent cinquante mille dollars. Rocky travaille comme collectionneur pour un usurier et il s’entraîne dans de petits gymnases dans la banlieue de Philadelphie. Tous les amateurs de boxe le connaissent. Rocky aime les séances d’entraînement. Il s’entraîne sans répit. Il en aura fallu du temps pour que Rocky parvienne à convaincre son entraineur de l’entrainer. Car Mickey a la tête dure, c’est un ancien combattant. Rocky ne s’entraîne pas assez, quelque chose lui trotte dans la tête ces jours-ci, il pense à une femme. Ça se voit tout de suite à l’entraînement quand on a l’esprit qui flâne. Mickey le sent dans ses coups, Mickey le ressent dans sa respiration. Rocky n’aime pas mentir, mais une femme, oui, il y en a une.

— Mickey, je dois te dire quelque chose…, continue Rocky.

— Je le savais que tu me cachais un truc, s’étonne Mickey.

— Je ne te cache rien, je voulais te l’annoncer d’homme à homme. Je fréquente…

— Tu fréquentes ! s’étonne Mickey.

— Enfin oui, je flirte avec une femme. Elle travaille à temps partiel à l’animalerie J&M Tropical Fish. Et je l’aime, je l’aime plus que tout.

— Elle a un prénom ? demande Mickey.

— Elle s’appelle Adrian et elle compte me soutenir aussi bien à l’entraînement qu’au grand combat contre Apollo Creed.

— Je serais plus que ravi de la rencontrer. Elle doit être charmante. Retournons à l’entraînement maintenant que tu t’es vidé le cœur. Elle rejoindra notre équipe.

— Je n’en doute pas Mickey, continue fièrement Rocky.

Ces jours-ci, l’église de Rocky, c’est l’entraînement à l’entrepôt. C’est là qu’il prie furieusement parmi les autres boxeurs. Des affiches annoncent son combat dans la catégorie poids lourds contre Apollo Creed. Rocky n’a aucune chance, mais c’est l’esprit du sport. Les quatre rings de l’entrepôt sont déjà occupés. On entend le bruit sourd des gants contre les plastrons et les sacs de terre, les râles virils, les chaussures qui crissent. Ici, les boxeurs existent, et Rocky aime ce lieu. Il s’y oublie. Son entraîneur Mickey peine à le retenir quand il s’emporte. « Doucement, ménage tes forces », lui répète-t-il. Rocky admire la technique de Muhammad Ali, alias Cassius Clay, qui a gagné la médaille d’or aux Jeux olympiques de Rome. Il faut esquinter son adversaire. Non pas frapper plus, mais frapper bien, et là où il faut. « Il faut tourner en rond et monter sa garde ! » explique Mickey à son élève.

 

Alan Alfredo Geday

 

bottom of page