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Robinson Crusoé, 1956


Getty Images

 

Ce week-end, Grandma le passe chez ses petits-enfants dans le Surrey. Elle n’est pas venue pour rien, et elle compte bien en profiter pour les accompagner dans tous les moments de la journée, jusqu’à la dernière heure, jusqu’à éteindre la lampe à huile de leur chevet. Grandma, c’est la grand-mère d’Oliver et Peter. Et comment faire pour raconter une histoire à ses petits-enfants ? Est-ce que ce sera dans le lit de Peter qui a l’habitude de s’endormir au cours de la lecture ? « Cette fois-ci, Grandma racontera l’histoire dans mon lit », a expliqué Oliver à son petit frère Peter. Pour Peter, il en est hors de question. Il ne veut pas écouter cette histoire pleine d’émotion, d’aventures, de suspens, et d’action dans le lit d’Oliver. S’il s'endort dans le lit de son frère sans sa peluche préférée, il ne fera pas de beaux rêves. Cette histoire, c'est Robinson Crusoé de Daniel Defoe.

 

C'est un beau livre illustré, à la couverture brune, que Grandma pose devant elle, grand ouvert sous les yeux des enfants éblouis. À la clarté des lampes, les deux enfants ont l'impression de plonger dans un rêve éveillé. Ils partent en expédition sur cette île déserte, aux côtés de Robinson. Ils frémissent, ils s'inquiètent, ils poussent des « ah » et des « oh ». Grandma sait mettre l'intonation qu'il faut, sa voix douce a des inflexions mystérieuses et profondes. Que va-t-il arriver à ce cher Robinson ? Peter lutte contre le sommeil en se frottant les yeux. Il ne veut pas en perdre une miette. Oliver agrippe le bras de Grandma pour exprimer son émotion. « Il ne faut pas que j’oublie que nous avions dans le vaisseau un chien et deux chats. Je dirai à propos quelque chose de leur histoire fameuse. J’emportai les deux chats avec moi ; quant au chien, il sauta de lui-même hors du vaisseau et vint à la nage me retrouver à terre, après que j’y eus conduit ma première cargaison. Pendant bien des années, il fut pour moi un serviteur fidèle ; je n’eus jamais faute de ce qu’il pouvait m’aller quérir, ni de la compagnie qu’il pouvait me faire ; seulement j’aurais désiré qu’il me parlât, mais c’était chose impossible. J’ai dit que j’avais trouvé des plumes, de l’encre et du papier ; je les ménageai extrêmement, et je ferai voir que tant que mon encre dura, je tins un compte exact de toutes choses ; mais quand elle fut usée cela me devint impraticable, car je ne pus parvenir à en faire d’autre par aucun des moyens que j’imaginai. »

 

— Et vous, que feriez-vous seuls sur une île déserte ? demande Grandma.

— Moi, je chercherais le trésor ! s’enthousiasme Peter.

— Quel trésor ? se moque Oliver.

— Il y a toujours un trésor sur une île déserte ! reprend Peter.

— Et même s'il y avait un trésor, l'or ne se mange pas, l'or ne te protège pas des bêtes sauvages, l'or ne t'abrite pas de la tempête ! reprend Grandma.

— Moi aussi j'aurais pris des animaux de compagnie ! répond Oliver. On doit se sentir seul sur une île déserte ! Et je leur apprendrais à parler !

— Comment tu leur apprendrais à parler ? s'étonne Grandma. Les bêtes ne parlent pas, c'est pour ça que ce sont des bêtes.

— Dans mon île, les bêtes parleraient, c'est tout, affirme Oliver.

— Eh bien les garçons, je vois que vous ne vivriez pas longtemps sur votre île déserte ! s'amuse Grandma. De vrais petits Anglais de salon !

— Et toi Grandma, que ferais-tu alors ? demande Oliver.

— Moi j'écrirais mes mémoires, pour éduquer mes petits-enfants !

 

Alan Alfredo Geday

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